dimanche 13 juillet 2014

Pluriels scientifiques


Ce billet aurait dû s’intituler « Pluriels latins ou grecs », mais on aurait pu penser que j’allais me lancer dans un cours (incongru) sur ces deux langues, ce qui n’est évidemment pas le cas.
Alors que les langues vivantes, en particulier l’anglais, évoluent — plus ou moins rapidement — dans le sens de la simplification, il existe cependant une large série de substantifs qui résiste à cette tendance. Il s’agit de mots anglais d’origine latine ou grecque qui, peut-être anecdotiques dans le langage courant, sont néanmoins très présents dans le domaine qui vous intéresse : celui du médical et de la santé, via la biologie notamment. Or ces mots conservent leur pluriel d’origine — même s’il existe aussi, souvent, une forme régulière. Libre à vous, quand besoin est, d’utiliser cette dernière, mais vous devez savoir que l’autre a cours et pouvoir la reconnaître.
Pour effectuer un parallèle avec le français, notre langue a connu une situation similaire, avec un débat à l’Académie française resté célèbre, entre les tenants du respect des pluriels étrangers et leurs opposants, où un académicien partisan des pluriels francisés et dont je n’arrive plus à retrouver le nom aurait jeté à ses contradicteurs, pour stigmatiser le ridicule de ces pluriels dits « pédants » en français, qu’il allait faire « pipus dans les cacti ». C’est ainsi qu’on dit et écrit désormais des scénarios et des minimums, par exemple.

En anglais, certaines professions restent plus que dans d’autres langues jalouses de leur jargon — les juristes au premier chef — et perpétuent un élitisme corporatiste qui, au-delà de la nécessité évidente d’un vocabulaire technique pour chaque métier, privilégie un langage hermétique afin de n’être pas compris par le commun des mortels, d’entretenir une certaine supériorité ainsi que de conserver leur prérogatives. Cela ne vous fait pas penser aux médecins ?

Pour ceux et celles qui en douteraient, non, ces pluriels ne sont pas, pour une grande partie d’entre eux, anecdotiques. J’en veux pour preuve ceux qui figurent dans ma série de billet suivante sur les systèmes physiologiques.

Désinence
du singulier
Désinence
du pluriel
Exemple
Langue
d’origine
-a
-ae /i/
latin
-en
-ina /ənə/
grec
-ex
-ices /əsiz/
latin
-ies
-ies (invariable)
latin
-is
-es /iz/
latin
-itis
-itides
grec
-ix
-ices /ɪsiz/
latin
-on
-a /ə/
grec
-ma
-mata /ətə/ ou /ɑtə/
stoma → stomata
grec
-nx
-nges /dʒiz/
larynx → larynges
grec
-um
-a
latin
-ur
-ora
latin
-us³
-i
latin

Notes
   Les liens hypertextes sous-jacents aux exemples revoient à la prononciation, la plupart du temps, du singulier, du pluriel régulier et du pluriel latin ou grec.
¹  Il n’existe pas de pluriel régulier pour ce mot.
²  Il existe un pluriel régulier, mais il n’est pas employé.
³  Exceptions : fetus, virus et sinus, dont les pluriels sont réguliers, soit, respectivement, fetuses, viruses et sinuses ; genus, qui a un pluriel régulier, genuses, et un pluriel irrégulier, genera.

Remarques
  • Dans certains cas, le pluriel grec ou latin est plus employé que le pluriel régulier (exemples : criteria, phenomena) ; dans d’autres, plus nombreux, c’est l’inverse.
  • Dans d’autres cas, le pluriel latin ou grec est réservé à un sens du mot, tandis que le pluriel régulier s’emploie pour un autre sens.
  • J’ai dit que la plupart de ces pluriels n’étaient pas anecdotiques ; il en existe cependant deux qui on récemment fait se bidonner les anglophones sur la Toile : penes, pluriel de penis, et vaginae, pluriel de vagina. Les pluriels réguliers penises et vaginas sont incontestablement plus usités, à tel point que je n’avais jamais vu ni entendu leurs homologues latins, et la plupart des anglophones non plus.
  • En complément, vous pourrez lire la section de l’article Wikipédia sur les pluriels anglais consacrée aux pluriels latins et grecs.
  • Pour les autres pluriels irréguliers de l’anglais, vous trouverez une intéressante infographie ici.

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